Manifeste des Bahutu

Le est publié le Manifeste des Bahutu dont le titre original est Note sur l’aspect social du problème racial indigène au Rwanda. Ce document d’une dizaine de pages, rédigé par neuf intellectuels hutu et adressé au vice-gouverneur général du Rwanda, dénonce « l’exploitation » dont sont victimes les Hutu, en réponse au Manifeste des Tutsi dont le titre original était Mise au point et qui était adressé à la Mission de Visite de l'ONU de passage au Rwanda.

Ce Manifeste est publié dans un pays où les Tutsi (qui représentent 14 % de la population rwandaise) exercent une domination politique sur les Hutu (83 % de la population). Cette domination est permise par la croyance, partagée par tout le monde, selon laquelle les Tutsi seraient des Ibimanuka, des « descendus du ciel », qui auraient apporté les principes de la civilisation aux Hutu, les « Trouvés sur place ». Sous l’impulsion de l’Église catholique romaine, en la personne de Monseigneur Perraudin, les élites hutu bénéficient d’un travail progressif de « conscientisation »[1] qui va les amener à se penser en tant qu’égaux des Tutsi et vouloir s’émanciper de la tutelle de ces derniers. Enfin, la Belgique s’est engagée le par un accord signé avec l’ONU à mener le Ruanda-Urundi vers l’indépendance. Certaines mesures prises doivent favoriser un processus démocratique. L’une d’elles, le , consiste en la suppression de l’ubuhake, un contrat de servage pastoral très défavorable aux Hutu. Mais dans la réalité, cette réforme n’est pas suivie du partage des terres. La portée limitée de cette mesure a donc pu, peut-être, contribuer à une prise de conscience plus rapide des Hutu de leur infériorité sociale[2]. C’est dans ce contexte qu’est publié le Manifeste des Bahutu qui peut apparaître comme le point de départ de l’action politique des Hutu. Il se traduit par des revendications sociales apparemment modérées et par une radicalisation de l’opposition Hutu-Tutsi.

  1. Jean-Marc Balencie et Arnaud de La Grange (dir.), Mondes rebelles. Guérillas, milices, groupes terroristes, Paris, Michalon, 2001.
  2. Cette idée est suggérée dans le tome 2 de L’Histoire générale de l’Afrique noire dirigé par Hubert Deschamps.

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