Nationalisme

Carte des drapeaux du monde pendant la Guerre froide en 1965.

Le nationalisme est un principe politique apparu à la fin du XVIIIe siècle, tendant à légitimer l’existence d’un État-nation pour chaque peuple, défini par des caractéristiques propres et communes à ses membres, comme une langue, des traditions historiques et culturelles ou des valeurs politiques[1].

Initialement le nationalisme est opposé à la royauté (régime politique qui en France sera ensuite nommé Ancien Régime). Il s’impose progressivement en Europe au cours du XIXe siècle et se traduit au début du XXe siècle par la disparition de quatre empires multiethniques et autocratiques : les deux Empires centraux germaniques, le russe et le turc. Depuis son avènement, le nationalisme apparaît comme une évidence dans la vie politique et sociale[2].

Ce terme désigne aussi des mouvements politiques déclarant vouloir exalter une nation sous toutes ses formes (État, culture, religion, ethnie, langue, histoire, traditions, préférence nationale pour l'emploietc.), par opposition aux autres nations et populations. Cette deuxième variante du mouvement s'est développée à partir de la fin du XIXe siècle, vers 1870 : chauvine et xénophobe, elle trouvait alors ses militants principalement dans la petite bourgeoisie[3],[4],[5].

À la base, il prêche la loyauté et le dévouement à sa nation, l'indépendance politique, la présence d'une idée nationale pour la protection pratique des conditions de vie de la nation, de son espace de vie, de ses ressources économiques et de ses valeurs spirituelles.

En pratique, le nationalisme peut être considéré comme positif ou négatif, selon le contexte et la vision du monde individuelle. Les nationalismes dans différents pays à différentes périodes de temps sont très différents. Le nationalisme a été un moteur important des mouvements d'indépendance tels que la révolution grecque, l'indépendance irlandaise, la grande révolte arabe, le mouvement national palestinien, la décolonisation des pays du tiers-monde, la résistance iranienne pendant la Guerre Iran-Irak et l'effondrement de l'Union soviétique[6],[7]. À l'inverse, le nationalisme expansionniste impérialiste a également été un facteur clé de provocation de guerre, comme le fascisme, le nazisme et le suprémacisme.

La valeur morale du nationalisme, la relation entre nationalisme et patriotisme et la compatibilité du nationalisme et du cosmopolitisme sont autant de sujets de débat philosophique. Le nationalisme peut être combiné avec divers objectifs politiques et idéologies telles que le conservatisme (national-conservatisme) et/ou le socialisme (nationalisme de gauche)[8],[9],[10], les deux défendent globalement les mêmes principes de défense de l'état-nation et la protection de l'identité nationale et se retrouvent dans les différents nationalismes de type civique, culturel et/ou ethnique, mais diffèrent sur la question des principes socio-économiques.

Le nationalisme apparaît aussi, à partir du milieu du XIXe siècle, comme un sentiment national plus ou moins répandu et exalté au sein de la population d'un pays, et s’invitant (surtout au XXe siècle) au sein de multiples doctrines ou idéologies politiques. Il a pu être considéré comme vertueux pour justifier les luttes de libération nationale et d'émancipation, mais il a également servi de justification aux épurations ethniques du XXe siècle[11]. Cette omniprésence s’explique peut-être parce que le sentiment national est devenu « puissamment mobilisateur », comme l’avaient compris dès le printemps des peuples de 1848 certains conseillers de dynasties européennes[12],[13].

  1. Gellner 1989 (1983 pour l’édition anglaise), chapitre 1. Le terme de principe politique est repris dans Hobsbawm 1992, chapitre I et revendiqué comme venant du texte de Ernest Gellner.
  2. Comme il est souligné dans Michel 1995, Introduction, page 13, ni Ernest Gellner ni Benedict Anderson ne considèrent le nationalisme comme une idéologie. De son côté Eric Hobsbawm ramène les idées nationalistes à l'égalité « nation = État = peuple », ajoutant que les autres détails sont propres à chaque nation suivant son histoire, voire à chaque auteur, et ont été « houleusement débattus » au XIXe siècle par des théoriciens (Hobsbawm 1992, chapitre I).
  3. Hobsbawm 1992, chapitre IV.
  4. Jean Claude Caron, Michel Vernus, dans la Conclusion générale, p. 438 et suivantes de leur livre L'Europe au XIXe siècle : Des nations aux nationalismes, aux éditions Armand Colin, 2008, (ISBN 9782200217112).
  5. Noiriel 2009, p. 162-170 : En France, au XIXe siècle, ce mouvement politique s’est vite répandu dans certaines couches de la population ouvrière (les ouvriers de la génération de l’artisanat, en bref, pas tellement celle de la grande industrie qui s’en est démarqué explicitement en 1888 au 3e Congrès des syndicats ouvriers de France), sous l’impulsion de partis de gauche : le patriotisme/nationalisme est alors opposé au capitalisme.
  6. Beissinger, Mark. Nationalist Mobilization and the Collapse of the Soviet State. Cambridge University Press, 2002. p.8.
  7. Krikorian, Shant. «The Demise of the USSR in the Face of Nationalism « https://web.archive.org/web/20191121034344/https://prospectjournal.org/2010/12/01/the-demise-of-the-ussr-in-the-face-of-nationalism/ »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?), ». Prospect: Journal of International Affairs. University of California, San Diego, 1er décembre 2010.
  8. (en) Valerie Bunce, « Comparative Democratization: Big and Bounded Generalizations », Comparative Political Studies, vol. 33, nos 6–7,‎ , p. 703–734 (ISSN 0010-4140, DOI 10.1177/001041400003300602, S2CID 153875363, lire en ligne)
  9. Matthew Adam Kocher, Adria K. Lawrence et Nuno P. Monteiro, « Nationalism, Collaboration, and Resistance: France under Nazi Occupation », International Security, vol. 43, no 2,‎ , p. 117–150 (ISSN 1531-4804, DOI 10.1162/isec_a_00329 Accès libre, S2CID 57561272, lire en ligne)
  10. (en) Bart Bonikowski, Yuval Feinstein et Sean Bock, « The Partisan Sorting of "America": How Nationalist Cleavages Shaped the 2016 U.S. Presidential Election », American Journal of Sociology, vol. 127, no 2,‎ , p. 492–561 (ISSN 0002-9602, DOI 10.1086/717103, S2CID 246017190, lire en ligne)
  11. Girardet 1996, chapitre 1.
  12. Thiesse 1999, première partie, chapitre 4.
  13. Anderson 1996, chapitre 5.

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